Emmanuelle Cosse, la présidente de l'Union sociale pour l'habitat, fait part de l''inquiétude des bailleurs sociaux qui perdure face aux hausses à venir des factures d'énergie. Le "bouclier tarifaire" annoncé par le gouvernement n'est pas à la hauteur de l'explosion des coûts, juge-t-elle.
Lors du congrès de l’Union sociale pour l’habitat à Lyon, fin septembre, le sujet était sur toutes les lèvres : comment faire face à la hausse du coût du gaz et de l’électricité, avec des locataires du parc social aux revenus de plus en plus bas, alors que certains bailleurs sociaux en renouvellement de contrat d’approvisionnement se retrouvaient avec des prix passés de 30 à 40 euros en moyenne à plus de 300 euros le MWH ?
Venu clôturer le congrès, Olivier Klein, le ministre du logement, avait rappelé les annonces de la Première ministre Elisabeth Borne le 14 septembre dernier, avec une poursuite du bouclier tarifaire pour 2023, et une hausse limitée à 15% pour le gaz applicable à tous les ménages, les copropriétés, les logements sociaux, les petites entreprises et les plus petites communes. Oublié, le chauffage électrique devait aussi bénéficier du même dispositif – le décret entérinant cette mesure est toujours en attente.
Une aide plus qu’un bouclier
Le 15 novembre, le décret confirmant la poursuite du bouclier tarifaire pour 2023 est bien paru, mais rien n’est réglé pour Emmanuelle Cosse, la présidente de l’Union sociale pour l’habitat. « Le dispositif qui s’applique pour les bailleurs sociaux est une aide, pas un bouclier « , reproche-t-elle. Le dispositif tel qu’il est conçu pour les bailleurs sociaux prévoit une prise en charge de la différence entre le prix plancher de 64,9 euros, et un prix mensuel moyen qui varie en fonction des fluctuations du marché, mais de nombreux bailleurs sociaux qui arrivaient en fin de contrat ont du conclure un nouveau marché avec un coût supérieur à ce prix moyen.
De plus, tous les mois la compensation varie en fonction du prix mensuel moyen du gaz fixé. « Et si le marché mondial de l’énergie se met à baisser c’est encore pire pour les bailleurs sociaux », ironise Emmanuelle Cosse, puisque la compensation touchée sera moindre.
Concurrence absente
La présidente de l’USH rappelle, face aux propos du président de la République qui avait appelé à ne pas signer les contrats aux montants proposés, que les bailleurs sociaux ont l’obligation légale de fournir de l’énergie à leurs locataires, et que nombre d’entre eux se retrouvent avec des appels d’offres sans réponses, malgré l’accord conclu le 5 octobre entre le gouvernement et les énergéticiens.
Les bailleurs sociaux calculent traditionnellement le montant des charges facturées aux locataires en se basant sur l’année précédente. Il se retrouvent donc aujourd’hui face à un choix entre différentes stratégies : se baser l’année N-1 et en fin d’année, avec des charges qui restent raisonnables, faire des régularisations de charges qui risquent d’être insupportables pour les locataires, ou se baser sur les prix actuels avec des compensations qui varient chaque mois.
L’Union sociale pour l’habitat est aussi inquiète pour les bailleurs sociaux qui arrivent en fin de contrat en 2023, et qui sont sans visibilité sur les tarifs qui vont leur être proposés. Alors que les bailleurs sociaux achetaient auparavant à prix fixe, il leur est désormais conseillé d’acheter à prix variable, ce qui demande un accompagnement par des spécialistes du sujet. Ils se voient imposer des délais de paiement plus courts, des durées longues pour bénéficier de tarifs inférieurs…
Un soutien supplémentaire
Dans l’attente d’une réponse de la ministre de la transition énergétique Agnès Pannier Runacher, Emmanuelle Cosse rappelle les demandes de l’Union : des prix capés comme pour les particuliers, la parution du décret élisant le chauffage électrique au même dispositif de soutien financier. Elle réclame aussi que le chèque énergie puisse être utilisé par les locataires pour payer leurs charges aux bailleurs sociaux, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, ainsi qu’une revalorisation du forfait charges des aides personnelles au logement. Si les impayés ne semblent pour le moment pas avoir sensiblement augmenté, les mois prochains risquent d’être plus raides, pour les locataires du parc social mais aussi pour les habitants des grandes copropriétés privées, logés à la même enseigne.
16 novembre 2022
La Gazette des Communes