Le ministre de l'Intérieur esquisse les premières pistes de réflexion concernant le financement des services d'incendie et de secours et évoque le renforcement de la fraction de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances versée par les départements, dans un entretien au JDD.
Alors que le président de la République veut convoquer dès la rentrée les acteurs des départements touchés par les feux de forêt (pompiers, pilotes, agriculteurs, élus, etc.) pour revoir le modèle de prévention et de lutte contre les incendies, Gérald Darmanin esquisse les premières pistes de réflexion.
Dans un entretien au JDD daté du 20 août, le ministre de l’Intérieur revient sur la question du financement des Sdis, vieux serpent de mer de la sécurité civile, et évoque un renforcement de la part de la taxe spéciale sur les conventions d’assurances (TSCA) reversée aux Sdis par les départements. « Seuls 40 à 60% du produit de cette taxe leur revient effectivement aujourd’hui, précise-t-il. Je pose donc la question aux élus départementaux, dont je fais partie, peut-être faudrait-il déjà en reverser une plus grande part aux Sdis ».
Revoir la clé de répartition de la « TSCA Sdis »
Cette proposition apparaît comme un premier pas en direction des élus et des professionnels qui, depuis longtemps, réclament un renforcement du financement des Sdis. En réalité, la déclaration de Gérald Darmanin renvoie directement à leur demande formulée cet été, au plus fort des incendies qui ont frappé le sud-ouest du pays.
Dans une tribune publiée le 13 août sur le site du même JDD, les présidents de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, de la l’Association nationale des directeurs de Sdis (Andsis), ainsi que de la Conférence nationale des Sdis (Cnsis), préconisent en effet de « revoir la clef de répartition » de cette taxe spéciale et de doubler la part reversée aux Sdis.
Cette mesure doit être discutée « dès à présent, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023 », pressent les signataires. « En mettant en péril leurs vies pour protéger les personnes et les biens, les sapeurs-pompiers et plus largement les acteurs de la sécurité civile permettent aux assurances un taux d’évitement conséquent, et donc des économies non négligeables » concluent-ils.
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Dans une réponse écrite à la sénatrice Anne Vantalon publiée le 24 février dernier, le gouvernement, qui se disait alors opposé à une hausse de la part de la TSCA au profit des départements, rappelait que ces derniers se voyaient affecter depuis la loi de finances pour 2006 une fraction de 6,45 % du produit de cette taxe dynamique « qui atteint, en 2020, 1,2 Mds€, soit une augmentation de près d’un tiers par rapport à 2006 et de +42 M€ par rapport à 2019, et ce malgré la crise sanitaire ».
Par sa déclaration, le ministre apporte donc une réponse aux auteurs de cette tribune tout en renvoyant le débat dans le camp des départements. Sur le fond, cependant, Gérald Darmanin n’évoque aucunement le débat sur la revalorisation du montant de cette « TSCA Sdis », ou même sa répartition entre les différents bénéficiaires.
Pour sa part, la fédération France Assureurs rappelle que les assureurs n’ont pas la main sur la répartition de la TSCA qui « relève exclusivement des pouvoirs publics », souligne son directeur, Franck Le Vallois. La fédération qui réunit 99% des entreprises d’assurances entend faire de la prévention le levier le plus efficace de la lutte contre les incendies.
« Dans une logique de responsabilité collective, un moyen d’aider les pompiers à lutter contre les feux de forêt est de sensibiliser dès le plus jeune âge aux mesures de prévention et de renforcer les dispositifs d’entretien » poursuit-il.
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Gendarmes verts, sapeurs-pompiers volontaires : ce que Gérald Darmanin préconise
Interrogé par le JDD, Gérald Darmanin annonce également vouloir lancer « 3 000 postes de gendarmes verts » afin d’améliorer « le travail d’enquête judiciaire », notamment dans les affaires d’incendies volontaires. « L’objectif est que, dans chaque brigade de gendarmerie, il y ait des gendarmes formés aux atteintes à l’écologie. Ce sera une révolution », assure le ministre. Cet été, « il y a eu entre 80 et 120 départs de feux par jour dans notre pays » et « nous avons procédé à ce jour à 26 interpellations de pyromanes présumés ».
Reprenant une antienne de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, le ministre évoque aussi la question de la vocation des sapeurs-pompiers volontaires « de moins en moins nombreux parce que les employeurs rechignent à les libérer, voire les embaucher ». « Dès lors, un jeune peut hésiter entre sa vie professionnelle et sa passion de pompiers » relève-t-il, sans fournir de pistes de réforme.
Au cours de l’été, la « Fédé » a réitéré sa demande de recruter 50 000 volontaires d’ici à 2027, pour atteindre la barre des 250 000. Un objectif qui doit passer par une « grande campagne de communication nationale », selon son président Grégory Allione, qui propose pêle-mêle de davantage recourir au Service National Universel, d’augmenter de 3,5 % l’indemnité touchée lors des interventions ou formations, actuellement fixée à 8 € par heure et de récompenser l’engagement par une bonification à la retraite, dès les cinq premières années et non quinze comme c’est le cas aujourd’hui.
Enfin, autre sujet sur la table, le ministre évoque la part croissante que les sapeurs-pompiers prennent dans le remplacement des ambulanciers et des urgentistes. « Cela représente 40% de leurs interventions » précise-t-il.
22 août 2022
La Gazette des Communes