Réforme des retraites : c’est l’abrogation que les travailleurs demandent
03 novembre 2025
Imposée à coup de 49.3 en 2023, la réforme des retraites – qui recule de deux ans (à 64 ans) le départ légal à taux plein et qui accélère le calendrier Touraine (décidé en 2014 et entré en vigueur en 2020) de l’allongement de la durée de cotisation – demeure au cœur de la contestation des travailleurs.
FO demande ainsi toujours son abrogation. Annoncée le 14 octobre par le Premier ministre, la «suspension» de la réforme jusqu’à l’élection présidentielle de 2027, plus exactement jusqu’au 1er janvier 2028 pour les mesures visées, jette le trouble à plus d’un titre, et sans satisfaire.
La suspension ne peut qu’être un préalable à l’abandon de la réforme in finesoulignaient le 20 octobre les huit organisations, dont FO, formant l’intersyndicale. Et de préciser que cette suspension signifie que les générations nées en 1964 et en 1965 pourraient partir quelques mois plus tôt que prévu, à 62 ans et 9 mois et avec 170 trimestres de cotisations, soit les conditions de départ appliquées à la génération née en 1963, déjà impactée par la réforme (initialement le départ légal pour une retraite à taux plein était de 62 ans avec 168 trimestres), tout comme les générations nées à partir du mois de septembre 1961. La mise en pause de la réforme induirait pour les générations nées en 1964 et 1965, une possibilité de départ avancé de seulement trois ou six mois selon l’année de naissance, et une durée de cotisation « réduite » d’un ou deux trimestres par rapport à ce qui était prévu par le calendrier de la réforme de 2023. La confédération a rappelé dès le 14 octobre que la suspension n’est pas l’abrogation.
Après avoir évoqué l’éventualité d’une prise en compte de la mesure via un amendement (donc susceptible d’être rejeté) au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), le gouvernement a finalement inscrit celle-ci au PLFSS le 23 octobre via une « lettre rectificative ». Le projet de loi (garni de quelque 1 500 amendements), examiné en commission des Affaires sociales depuis le 27 octobre et jusqu’au 31, sera débattu à l’Assemblée du 4 au 12 novembre. Le 29 octobre, la commission a rejeté la partie « recettes » du texte. Le texte débattu dans l’hémicycle sera le projet initial du gouvernement. Alors que celui-ci a assuré qu’il n’userait pas du 49.3 (adoption sans débat et sans vote) pour faire passer les projets budgétaires pour 2026, en cas d’adoption en première lecture du PLFSS par l’Assemblée, le texte – donc amendé – suivra un chemin classique (la navette parlementaire) en allant devant le Sénat. En cas de rejet, c’est le texte gouvernemental initial qui sera transmis au Sénat. Son Président, Gérard Larcher, prévient d’ores et déjà que si l’Assemblée vote la suspension de la réforme des retraites, la Haute assemblée rétablira la réforme. L’Assemblée garde toutefois la main en dernier ressort.
La retraite à points toujours en embuscade?
Ce n’est ni une abrogation, ni une suspension de la réforme mais un décalage d’une échéance insistait quant à lui le 21 octobre le président de la République, Emmanuel Macron, évoquant aussi des « perspectives de référendum ». Cela tandis qu’au sein de l’exécutif, l’éventualité d’une réforme des retraites à points, déjà tentée en 2020 et combattue vigoureusement notamment par FO, semble ne pas avoir été abandonnée. Le nouveau ministre du Travail, Jean-Pierre Farendou l’a ainsi évoqué, de même que la capitalisation, dans une interview le 18 octobre au quotidien Ouest-France. Soit six jours après sa nomination.
Le « coût » de la suspension de la réforme, suspension qui écarterait les carrières longues, serait de 100 millions d’euros en 2026 et de 1,4 milliard en 2027 selon le gouvernement qui prévoit de compenser par deux mesures : d’une part une hausse de la taxation (de 2,05% à 2,25%) des mutuelles et assurances complémentaires santé, et un renforcement – de 0,4 point à 0,9 – de la sous-indexation à l’inflation des pensions de base prévue à partir de 2027. Ce qui impacterait donc les assurés sociaux et les retraités. Lesquels sont parfois les mêmes !