Secrétaires de mairie : « Il y a urgence à lever l’article 40 de la Constitution »

Rédigé le 26/10/2023

En commission des lois de l'Assemblée nationale, plusieurs propositions pour revaloriser le métier de secrétaires de mairie ont été jugées irrecevables au motif que cela pourrait entraîner une charge supplémentaire pour les communes.

La rapporteure de la proposition de loi, Marie-Agnès Poussier-Winsback (Horizons et apparentés, Seine-Maritime) explique à la Gazette sa vision des débats à venir.

À ce stade de l’examen par les députés de la proposition de loi, des secrétaires de mairie relèvent que le sujet de la revalorisation salariale est quasiment absent. Que répondez-vous à cela ?

Effectivement. Nous avons tout de même rétabli la bonification d’ancienneté qui avait été supprimée par le Sénat. En pratique, cela permettra aux secrétaires de mairie d’acquérir plus rapidement l’ancienneté nécessaire au changement d’échelon et donc de voir leur rémunération évoluer plus rapidement. C’est loin d’être suffisant, mais les débats ne sont pas terminés.

Une vingtaine d’amendements déposés pour l’examen en commission des lois ont été jugés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution [il dispose que « les propositions et les amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique », ndlr]. Il est urgent de lever ce frein. Nous avions élaboré, avec Didier Lemaire, Laure Miller et Mathilde Desjonquères, un amendement visant à empêcher le recrutement en catégorie C. Ce serait une avancée cohérente avec le reste des apports de la proposition de loi et cela aurait une incidence certaine sur l’attractivité du métier. Il n’a pas été jugé recevable au motif que cela pourrait entraîner une charge supplémentaire pour les communes. Nous espérons que cette décision sera levée par le gouvernement en séance.

Pour le moment, la proposition de loi demande simplement au gouvernement la remise d’un rapport sur la requalification en catégories A et B des emplois de secrétaire de mairie afin d’engager des discussions à ce sujet… 

Je respecte le principe de libre administration des collectivités, mais l’argument des moyens n’est pas entendable dans un cas comme celui-ci.

Si les maires se rendaient compte que leur secrétaire de mairie leur évite des mises en examen, ils arbitreraient plus facilement. Certaines communes ont le moyen de le faire en leur faveur. Le sénateur Cédric Vial [LR, Savoie, ndlr] a suggéré de créer un fonds d’amorçage pour aider les communes les plus pauvres et pour une période limitée à revaloriser le métier. Mais je ne suis pas favorable à sa généralisation. Quand on est élu, on fait des choix politiques et l’on peut faire celui de mieux rémunérer sa secrétaire de mairie, l’agent polyvalent qui vous évite d’aller au pénal, plutôt que d’augmenter le fleurissement, organiser un nouvel événement… 

De quelle manière voulez-vous aussi faire avancer les débats parlementaires sur le régime indemnitaire (Rifseep) ?

Il est peu utilisé par les communes rurales, car ce dispositif suscite de l’appréhension. Ce n’est pas un outil facile à manier. L’idée est de trouver un moyen d’élaborer des catégories qui permettraient de « scorer » des compétences, des périmètres de responsabilité (école, station de ski, centré aéré à gérer) valant des points. Lesquels mèneraient à octroyer une prime de 2 000, 3 000, 5 000 euros… Mais je n’inscrirai pas dans cette loi le contrôle de sa mise en œuvre.

Un message que je veux faire passer : chaque secrétaire de mairie correspond à une collectivité. Dès qu’on veut préciser trop les choses, on en exclut d’autres. Mon fil rouge restera durant cette navette parlementaire : n’excluons surtout pas. Si l’on voulait être égalitaristes, nous raterions notre objectif initial de redevenir attractif.

26 octobre 2023
La Gazette des Communes