Collectivités : la résorption du déficit des retraites renchérit le coût de recrutement des fonctionnaires

01 avril 2025

La hausse de la contribution “employeur” à la CNRACL renchérit le coût de l’emploi d’un fonctionnaire par rapport à un agent contractuel… Une situation que regrettent les employeurs territoriaux, qui viennent d’avancer plusieurs pistes de réforme pour remédier à la situation budgétaire très dégradée de la caisse de retraite de leurs fonctionnaires. Ce qu’ils proposent : la mise en place d’une nouvelle contribution “assise sur la masse salariale contractuelle”. 

La CNRACL, la caisse de retraite des fonctionnaires territoriaux, va-t-elle être sauvée ? Auditionnés par la délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale, les représentants des employeurs territoriaux viennent d’avancer plusieurs pistes de réforme afin de remédier à la situation budgétaire très dégradée de cette caisse. Des pistes accueillies favorablement par les députés et qui pourraient être étudiées à l’occasion des discussions que le gouvernement Bayrou souhaite lancer sur la situation de la CNRACL.

L’audition des représentants des collectivités faisait suite à la hausse de 12 points d’ici 2028 de la cotisation “employeur” de la CNRACL. Une augmentation toujours vivement contestée par les employeurs territoriaux. Le président du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), Yohann Nédelec, a ainsi dénoncé une mesure “injuste” et ses nombreuses conséquences financières sur les collectivités.

Ce levier “ne va pas résoudre les problèmes structurels” de la CNRACL, a abondé le porte-parole de la Coordination des employeurs territoriaux (CET), Philippe Laurent, tout en se disant prêt à “rebattre les cartes totalement”.

“Effets pervers” de la hausse des cotisations

Les représentants des collectivités se disent notamment prêts à discuter de l’assiette de cotisation et du cas des contractuels qui, à l’inverse des fonctionnaires, cotisent au régime général de retraite et non à la CNRACL. Conséquence : une diminution progressive de la base cotisante à cette caisse du fait de la croissance de l’emploi contractuel dans l’ensemble de la fonction publique et donc dans la territoriale. La croissance de la part des contractuels “est un élément négatif pour la caisse”, a souligné Philippe Laurent. Et “la situation va encore s’aggraver si nous ne la réglons pas”, a ajouté Yohann Nédelec.

Surtout, ont abondé les représentants des employeurs, la hausse de la “contribution employeur” risque de renchérir le coût de l’emploi d’un fonctionnaire par rapport à un agent contractuel. Cela favoriserait “encore davantage la substitution de l’emploi fonctionnaire par l’emploi contractuel”, affirmaient d’ailleurs les inspections dans leur rapport de septembre 2024 sur la situation financière de la CNRACL. Un constat partagé par le président socialiste de la délégation aux collectivités de l’Assemblée Stéphane Delautrette, qui a pointé les “effets pervers” de la mécanique d’augmentation des taux de cotisation conduisant, selon, lui “au recours plus systématique à l’emploi contractuel”.

Une taxe sur la masse salariale des contractuels

“En 2028, pour un fonctionnaire de catégorie C, la hausse de la contribution représentera quasiment 400 euros de plus par mois, a indiqué Emmanuel Rousset de France urbaine.On fait tous nos calculs et même si nous très attachés au statut, un certain nombre d’entre nous vont avoir tendance à poursuivre des recrutements de contractuels ». Thomas Fromentin d’Intercommunalités de France s’est lui aussi dit préoccupé par un “renchérissement du coût de l’emploi” des fonctionnaires. Cela, a-t-il ajouté, risque d’avoir “un impact sur la capacité à avoir des services publics de bonne tenue au sein des collectivités”.

En ce sens, et comme ses collègues, il a jugé “intéressant” de “dégager une ressource additionnelle” pour la CNRACL, “avec la mise en place d’une contribution qui pourrait être assise sur la masse salariale contractuelle”. Les inspections proposaient, elles aussi, de créer une taxe sur la masse salariale des agents contractuels et d’affecter son produit à la CNRACL. Ce qui, selon elles, permettrait de “rendre le plus neutre possible l’arbitrage par l’employeur entre emploi contractuel et emploi fonctionnaire”. Une proposition qui devrait rapidement être remise sur la table puisque le gouvernement vient de remissionner ces inspections pour examiner et approfondir les différentes pistes de réformes qu’elles avançaient dans leur rapport.

31 mars 2025
Bastien Scordia
pour ACTEURS PUBLICS