Passe sanitaire pour les ados : embarras des professionnels de la culture et du sport


A partir du 30 septembre, les adolescents âgés de 12 à 17 ans devront à leur tour présenter un passe sanitaire dans les lieux où il est déjà exigé pour les majeurs, comme les piscines ou les musées. Partagés entre inquiétude et résignation, les professionnels des secteurs sportifs et culturels s’adaptent.

 

Formalité pour les uns, contrainte supplémentaire pour les autres. A leur tour, les agents des équipements culturels et sportifs vont devoir vérifier à partir du 30 septembre que les jeunes âgés de 12 ans et 2 mois à 17 ans disposent d’un passe sanitaire. Rentrée scolaire oblige, la mesure concerne tout particulièrement les bibliothèques, les musées, ainsi que les piscines ou les gymnases.

Prévisible bien qu’appréhendée, la mesure est diversement accueillie par les professionnels des secteurs concernés. Principale critique : la différence de traitement entre le milieu scolaire et la pratique libre ou en club. « Un élève pourra par exemple pratiquer du hand ou du volley sur le temps scolaire à 16h30. Mais à 17h, le club devra exiger le passe sanitaire, expose Jean-Marc Sentein, président de l’Association nationale des dirigeants et intervenants des installations des services des sports (Andiss). C’est difficilement compréhensible pour les mineurs. Et pour nous, les gestionnaires, l’organisation va être complexe. »

Un passe sanitaire sans « cohérence globale »

Une différenciation « absurde » pointée également par les dirigeants de clubs. « Les écoles qui viennent jouer sur nos terrains n’ont pas besoin de présenter un passe, déplore le dirigeant d’un club de football marseillais. Le même jeune, à l’entraînement après les cours, devrait, lui, le présenter ? C’est absurde. » Signe de ces réticences, un délai a été réclamé auprès des autorités. Le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) a ainsi demandé début septembre à décaler d’un mois l’entrée en vigueur du passe pour les 12-17 ans. Sans succès.

Une incompréhension partagée par le secteur culturel. « Jusqu’à présent, le passe sanitaire n’était pas obligatoire à l’école, remarque Alice Bernard, présidente de l’Association des bibliothécaires de France (ABF). On espérait un même traitement pour les bibliothèques. Mais il n’y a pas de cohérence globale. »

Une « mise en route progressive »

La question des contrôles suscite également des appréhensions. « Les chefs d’établissement sont réticents, les clubs essaient déjà de contrôler tant bien que mal, et les élus ne veulent pas mettre un agent devant chaque gymnase ou piscine, liste Jean-Marc Sentein. En réalité, personne ne souhaite vraiment contrôler. Et chacun se renvoie la responsabilité. » Si certains dirigeants prônent la bienveillance, d’autres assument qu’ils prendront des largesses. « C’est difficile de dire à un petit de 12 ans de ne pas venir s’entraîner parce qu’il n’a pas de passe sanitaire », reconnaît le dirigeant du club de football déjà cité. « Des bibliothèques ne vérifieront pas forcément le passe », abonde Alice Bernard.

 

Face à cet élargissement du passe sanitaire, l’adaptation demeure le principe clé. « Nous avons déjà sensibilisé nos adhérents sur les contrôles à venir, affirme ainsi Dominique Joly, de la Fédération sportive et culturelle de France (FSCF). Nous donnons également l’information aux nouveaux inscrits. Et pour les adultes, les bénévoles se chargent déjà des contrôles. » Ce qui n’empêche pas les doutes. « L’étape des adolescents m’inquiète davantage, poursuit Dominique Joly. Pour eux, nous aurons une application bienveillante, en s’adressant d’abord aux parents […] Il y aura une mise en route progressive les premiers jours. »

Principal enjeu : maintenir l’accueil du jeune public

Un principe de flexibilité également prôné par les acteurs du monde culturel. « On s’adapte, avec une vision territorialisée, avance ainsi Cécile Chanas, présidente de la Fédération des écomusées et musées de société (FEMS). Nous ne sommes pas spécialement inquiets. L’enjeu principal est d’assurer l’accueil du jeune public et d’avoir un système le plus simple possible, afin de ne pas être exclusif. C’est le bon sens qui prédomine. »

Alors que 64% des 12-17 ans ont reçu deux doses de vaccin, selon les chiffres de Santé publique France, certains professionnels s’inquiètent d’une mise à l’écart d’un public fidèle à la pratique sportive et culturelle, mais qui risque de s’en éloigner faute d’accès. « Tous n’auront pas leur passe d’ici à début octobre, regrette ainsi Malik Diallo, président de l’Association des directrices et directeurs des bibliothèques municipales et groupements intercommunaux des villes de France (ADBGV). On se prive donc d’un public. Or il faut retrouver le côté ouvert des bibliothèques le plus vite possible. »

Un constat partagé par Alice Bernard : « Les médiathèques sont des lieux d’accueil pour des jeunes, qui ne peuvent, par exemple, pas travailler à la maison. Nous allons perdre ces enfants, et ce sera difficile de les faire revenir après… »

Craignant une baisse de la fréquentation, plusieurs bibliothèques municipales ont entamé un mouvement de grève. A Lyon, le maire EELV Grégory Doucet, s’est quant à lui appuyé sur une disposition visant à garantir l’accès aux bibliothèques dans le cadre de travaux de recherche (art  1, II, 1°, j du décret 2021-955 du 19 juillet 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire) pour exonérer les 12-17 ans du passe sanitaire. Dominique Joly, également présidente d’une association sportive et culturelle à Bruz, près de Rennes (Ille-et-Vilaine), conclut : « Le passe sanitaire ne doit pas être un frein au retour du public aux activités sportives et culturelles. »

29 septembre

source La Gazette des Communes