Port du masque en extérieur : le Conseil d’Etat rappelle les principes
Dans une nouvelle ordonnance du 11 janvier, le juge des référés du Conseil d'Etat a rappelé les principes de proportionnalité et de lisibilité que les préfets doivent respecter lorsqu'ils imposent le port du masque dans la rue.
L’année 2022 a décidément un goût de 2020. Dans une ordonnance du 11 janvier, le juge des référés du Conseil d’Etat a de nouveau dû donner le mode d’emploi à suivre pour que le préfet puisse imposer le port du masque dans la rue. Cette nouvelle décision fait évidemment écho aux deux ordonnances rendues le 6 septembre 2020 sur le même sujet, dans lesquelles le juge des référés avait insisté sur la nécessité de toujours définir une règle proportionnelle, simple et lisible.
Dans cette nouvelle ordonnance, le requérant demandait la suspension de l’exécution de la décision du Premier ministre de donner instruction aux représentants de l’Etat territorialement compétents de mettre en œuvre l’obligation du port du masque en extérieur. Une possibilité prévue par l’article 1er du décret du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire.
Pour lui, il n’est pas établi que le port du masque en plein air en toute circonstance soit nécessaire en l’état actuel des connaissances scientifiques et du taux de vaccination de la population. De plus, les conditions d’application de cette obligation ne sont pas suffisamment encadrées.
Mais pour le juge des référés, les données scientifiques actuelles ne permettent pas d’exclure la possibilité d’une transmission du virus en cas de forte concentration de population dans un lieu de plein air.
Les conditions à remplir
Ainsi, pour le juge, « une obligation de porter le masque à l’extérieur, lorsque la situation épidémiologique localement constatée le justifie, en cas de regroupement ou dans les lieux et aux heures de forte circulation de population ne permettant pas le respect de la distanciation physique, n’apparaît pas, à la date de la présente ordonnance, manifestement dénuée de nécessité ».
On retrouve là le principe de proportionnalité de la mesure prise, déjà défini par le juge des référés dans ses ordonnances du 6 septembre 2020, qui doit prendre en compte le contexte local : « des dispositions rendant obligatoire le port du masque en extérieur doivent être justifiées par la situation épidémiologique constatée sur le territoire concerné. Elles ne peuvent être proportionnées que si elles sont limitées aux lieux et aux heures de forte circulation de population ne permettant pas d’assurer la distanciation physique et aux lieux où les personnes peuvent se regrouper, tels que les marchés, les rassemblements sur la voie publique ou les centres-villes commerçants, les périodes horaires devant être appropriées aux risques identifiés ».
Ensuite, le juge des référés reformule également le principe de lisibilité de la règle, qu’il avait imposé aussi dans ses ordonnances du 6 septembre : « le préfet, lorsqu’il détermine, pour ces motifs, les lieux et les horaires de port obligatoire du masque en plein air, est en droit de délimiter des zones suffisamment larges pour que la règle soit compréhensible et son application cohérente ».
La requête est donc rejetée. A noter ici qu’il ne s’agissait pas d’une demande de suspension d’un arrêté préfectoral en particulier, mais juste de l’instruction donnée aux préfets de rendre obligatoire le port du masque en extérieur. En donnant cette instruction, le Premier ministre n’a pas porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté individuelle, ni à la liberté d’aller et venir, ni à la liberté de réunion, et pas plus au droit à protection de la santé.
Rappelons enfin que cela signifie que l’obligation du port du masque n’est pas automatique. Elle doit être justifiée, sous le contrôle du juge. Dans cette ordonnance, le Conseil d’Etat le précise bien : « la mise en œuvre doit respecter, sous le contrôle du juge, les principes énoncés ».
Preuve en est, dès le 12 janvier, avec une ordonnance par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a suspendu l’arrêté du préfet des Yvelines : « compte tenu des particularités du département des Yvelines, très étendu et comprenant un certain nombre de communes rurales, certaines zones des 259 communes que compte le département, notamment lorsqu’un centre-ville peut être aisément identifié, pourraient, eu égard à leurs caractéristiques, être exceptées de l’obligation de port du masque édictée ».
RÉFÉRENCES
12 janvier 2022
Source La Gazette des Communes