Le piston et les magouilles méritent bien une rétrogradation


Même si elle n’avait aucun pouvoir de décision, l'agente qui utilise les moyens de son service et trompe son autorité hiérarchique pour inscrire sa fille à un voyage aux Etats-Unis commet une faute justifiant sa rétrogradation. Tel est le sens d'un arrêt de la Cour administrative de Versailles du 14 décembre.

Affectée au sein du service chargé des affaires périscolaires d’une commune, une animatrice territoriale dont la mission était notamment d’organiser des séjours au profit des enfants de la commune, en a profité pour ajouter sa fille à la liste des enfants inscrits pour un voyage aux Etats-Unis.

Après qu’une famille s’est étonnée de ne pas avoir reçu de réponse à sa demande d’inscription, le pot-aux-roses a été découvert et l’intéressée sanctionnée. Le maire l’a d’abord exclue pour un mois avec suspension de traitement, avant finalement de la rétrograder du 9ème échelon de la 1ère classe au 13e échelon de la 2e classe, ce qui constitue une sanction du 2ème groupe.

Le juge administratif a été saisi de cette affaire par l’agente, mais il a rejeté sa demande en première instance. En appel, la Cour administrative d’appel de Versailles en a fait de même et confirmé la légalité de la sanction contestée.

Usage abusif des moyens mis à la disposition de l’agent

Au cours d’une première phase de préinscription, quatre-vingt-trois enfants ont été préinscrits, dont la fille de l’agente, âgée de dix-sept ans. Après cette première étape, une commission, composée d’un élu et du supérieur hiérarchique de l’intéressée, a décidé de fixer à dix le nombre de participants au voyage aux États-Unis, avec une liste d’attente de dix autres enfants. Deux critères avaient été établis : l’absence d’impayés et la circonstance que les enfants n’aient pas bénéficié de voyages les années antérieures. En l’occurrence, la fille de l’agente ne figurait alors sur aucune des listes, puisqu’elle avait déjà bénéficié de séjours organisés par la commune lors des années passées.

En qualité de responsable de la gestion des inscriptions, l’agente devait par la suite, selon ses propres recommandations, contacter les familles retenues afin qu’elles confirment leur participation, en fournissant les documents nécessaires à l’inscription définitive. C’est à ce moment de la procédure que l’agente a alors inscrit sa fille, utilisant le courrier-type de réponse positive, signé par le maire adjoint délégué, sans contacter l’ensemble des familles concernées, notamment celles classées en liste d’attente.

Par ailleurs, en l’absence de la directrice, l’agente en cause a remplacé son nom par celui du père de sa fille, en tant que représentant légal, sur la liste des enfants préinscrits. Elle a aussi transmis la liste définitive des enfants retenus, comprenant sa fille, en apposant encore le nom de famille du père, ainsi désigné comme représentant légal. Autrement dit, l’agente s’est livrée à une manœuvre destinée à inscrire sa fille au séjour aux Etats-Unis organisé par la commune, au détriment des familles prioritaires et en trompant l’autorité hiérarchique.

Pour les juges, même si elle n’avait aucun pouvoir de décision, l’intéressée a abusé des moyens mis à sa disposition dans l’exercice de ses missions, et en particulier des courriers de la commune comportant la signature du maire adjoint. En conséquence, la CAA de Versailles a jugé que l’agent avait bien commis des fautes au regard, notamment, de ses devoirs de loyauté et de probité, de nature à justifier une sanction.

Faute grave

Restait à déterminer si la sanction prise à l’encontre de l’agente était proportionnée à la faute commise. Pour les juges de la CAA de Versailles, la réponse est affirmative : ils ont considéré en effet que compte tenu de la gravité des fautes commises délibérément par l’agente, par l’abus de sa position au sein de son service et des moyens dont elle disposait dans le cadre de ses fonctions, la décision du maire de la commune décidant de lui infliger la sanction litigieuse n’est entachée d’aucune erreur d’appréciation.

RÉFÉRENCES
1er février 2022
www.lagazettedescommunes.com