Le télétravail dans la fonction publique territoriale en 10 questions


La pandémie de Covid-19 a généralisé des modes de travail mixtes : en présentiel et en télétravail. De là, l'évolution récente des règles relatives à cette forme d'organisation du travail introduite dans la fonction publique par la loi dite "Sauvadet" de 2012. Le point en 10 questions.

01 – Qu’est-ce que le télétravail ?

Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle les fonctions qui auraient pu être exercées par un agent dans les locaux de son employeur sont réalisées hors de ces locaux de façon régulière et volontaire, en utilisant les technologies de l’information et de la communication.

Le télétravail peut être organisé au domicile de l’agent ou dans un autre lieu privé ou, éventuellement, dans des locaux professionnels distincts de ceux de son employeur public et de son lieu d’affectation.

On notera que les périodes d’astreintes ne constituent pas du télétravail.

Ainsi, en cas de circonstances exceptionnelles, c’est l’administration qui peut demander la mise en place du télétravail, afin d’assurer la continuité du service public et la protection des agents.

02 – Quel est le cadre juridique du télétravail ?

C’est la loi du 12 mars 2012, dite « Sauvadet », qui a reconnu la possibilité pour les fonctionnaires notamment d’exercer leurs fonctions dans le cadre du télétravail, tel qu’il est défini par le code du travail (art. L1222-9, alinéa 1).

Le décret du 11 février 2016 en précise notamment les modalités d’organisation. Désormais, les dispositions de cette loi ont été reprises par le code général de la fonction publique, à l’article L430-1. On notera que, même en l’absence de cadre réglementaire, le télétravail pouvait déjà être mis en œuvre.

Le Conseil d’Etat a jugé que l’application des dispositions de la loi « Sauvadet » alors en vigueur était possible en dépit de l’absence de mesures réglementaires d’application et il a considéré que le refus alors du Premier ministre d’édicter ce texte n’était pas illégal (1).

03 – Combien de jours peuvent-ils être exercés en télétravail ?

Pas plus de trois jours par semaine peuvent être consacrés au télétravail (décret n°2016-151). Ainsi, le temps de présence sur le lieu d’affectation ne peut pas être inférieur à deux jours par semaine. Ces seuils peuvent s’apprécier sur une base mensuelle.

Toutefois, il est possible de déroger à ces quotités à la demande des agents dont l’état de santé le justifie et après avis du médecin de prévention ou du médecin du travail. Cette dérogation n’est possible que pour six mois au maximum. Elle est renouvelable une fois après avis du médecin de prévention ou du médecin du travail.

Une dérogation est également ouverte à la demande des femmes enceintes, des agents éligibles au congé de proche aidant (pour trois mois maximum, renouvelable) et lorsqu’une autorisation temporaire de télétravail a été demandée et accordée en raison d’une situation exceptionnelle perturbant ­l’accès au service ou le travail sur site (décret n°2016-151, art. 4).

FOCUS

Quotité de travail – Pas plus de trois jours par semaine peuvent être consacrés au télétravail. Cependant, une dérogation à cette quotité est possible en raison de l’état de santé de l’agent.

Demande – Tout agent qui souhaite exercer ses fonctions en télétravail doit en faire la demande écrite. Sans autorisation il est impossible de télétravailler.

Résiliation – Il peut être mis fin à cette forme d’organisation du travail à tout moment, sous réserve d’un délai de prévenance de deux mois en principe.

04 – Toutes les fonctions peuvent-elles être exercées en télétravail ?

S’agissant de la fonction publique territoriale, une délibération de l’organe délibérant doit fixer les activités éligibles au télétravail (décret n°2016-151, art. 7 ; lire la question suivante).

Par ailleurs, c’est l’autorité territoriale qui apprécie la compatibilité de la demande avec la nature des activités exercées et l’intérêt du service (article 5, lire la question n°6).

05 – Que doit faire une collectivité pour permettre l’exercice de fonctions en télétravail ?

Comité technique, comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), et organe délibérant de la collectivité doivent intervenir.

Ainsi, une délibération de l’organe délibérant doit fixer les modalités de mise en œuvre du télétravail dans la collectivité, notamment, les activités éligibles au télétravail, la liste et la localisation des locaux professionnels éventuellement mis à disposition par l’administration pour l’exercice des fonctions en télétravail, le nombre de postes de travail qui y sont disponibles et leurs équipements ou les modalités de contrôle et de comptabilisation du temps de travail (décret n°2016-151, art. 7).

Après consultation du comité technique, ces modalités de mise en œuvre du télétravail doivent être précisées en tant que de besoin dans chaque service ou établissement. Les CHSCT compétents doivent, pour leur part, être informés des avis rendus par les comités techniques sur le sujet. Les membres du CHSCT peuvent visiter le lieu d’exercice des fonctions en télétravail. Si c’est au domicile de l’agent, son accord écrit est requis. Enfin, le télétravail fait l’objet d’un bilan annuel présenté aux comités techniques et aux CHSCT compétents.

06 – Comment l’agent doit-il faire sa demande ?

Conformément au décret du 11 février 2016 (art. 5), l’exercice des fonctions en télétravail est accordé sur demande écrite de l’agent, qui doit préciser les modalités d’organisation souhaitées. Sans autorisation, un agent ne peut pas télétravailler. Ainsi, le directeur général des services d’une communauté de communes qui télétravaillait de sa propre initiative sans autorisation de son employeur a commis une faute justifiant l’avertissement prononcé à son encontre (2).

Si le télétravail est organisé au domicile de l’agent ou dans un autre lieu privé, il doit joindre à sa demande une attestation de conformité des installations aux spécifications techniques.

S’il change de fonctions, l’agent doit présenter une nouvelle demande.

Enfin, une réponse écrite doit être donnée à la demande de télétravail dans un délai d’un mois maximum à compter de la date de sa réception ou de la date limite de dépôt, lorsqu’une campagne de recensement des demandes est organisée.

07 – Comment l’autorisation d’exercer des fonctions en télétravail est-elle délivrée ?

L’autorisation de télétravail est délivrée pour un recours régulier ou ponctuel au télétravail. Elle peut prévoir l’attribution de jours de télétravail fixes au cours de la semaine ou du mois ainsi que l’attribution d’un volume de jours flottants de télétravail par semaine, par mois ou par an dont l’agent peut demander l’utilisation à l’autorité responsable de la gestion de ses congés. Un agent peut, au titre d’une même autorisation, mettre en œuvre ces différentes modalités de télétravail (décret n°2016-151, art. 2-1). L’autorisation peut prévoir une période d’adaptation de trois mois, au minimum (décret n°2016-151, art. 5).

Par ailleurs, l’autorisation de ­télétravailler est accordée individuellement par le chef de service : une délibération interdisant tout télétravail au sein d’une collectivité territoriale est illégale (3).

Le décret du 11 février 2016 (art. 8) précise ce que doit contenir l’autorisation délivrée à l’agent d’exercer ses fonctions en télétravail. Elle doit mentionner, notamment, les fonctions de l’agent exercées en télétravail, le ou les lieux où il les exerce ou la date de prise d’effet de l’exercice des fonctions en télétravail.

Avec l’autorisation d’exercer des fonctions en télétravail, plusieurs documents doivent être remis à l’agent. Il s’agit, tout d’abord, d’un document d’information indiquant par exemple la nature des équipements mis à disposition de l’agent et les modalités d’appui technique fourni par l’employeur.

Ensuite, une copie des différentes règles à respecter (sécurité, temps de travail, etc. ; voir l’article 7 du décret n°2016-151) et un document rappelant à l’agent ses droits et obligations en matière de temps de travail et d’hygiène et de sécurité doivent également lui être remis.

08 – Comment prend fin l’autorisation de télétravail ?

Il peut être mis fin à cette forme d’organisation du travail à tout moment, sous réserve d’un délai de prévenance de deux mois en principe. En effet, l’autorisation donnée à l’agent peut prévoir une période d’adaptation de trois mois. Pendant cette période d’adaptation, ce délai est ramené à un mois. La décision de mettre fin au télétravail doit être prise par écrit, à l’initiative de l’administration ou de l’agent. S’il est mis fin à l’autorisation de télétravail à l’initiative de l’administration, le délai de prévenance peut être réduit en cas de nécessité du service dûment motivée. De plus, l’interruption du télétravail à l’initiative de l’administration doit être précédée d’un entretien et motivée.

S’il y a refus opposé à une demande d’auto­risation de télétravail et en cas d’interruption du télétravail à l’initiative de l’administration, les décisions doivent être motivées et précédées d’un entretien.

09 – Quelle est la situation de l’agent en télétravail ?

L’agent télétravailleur bénéficie des droits prévus par la législation et la réglementation applicables aux agents exerçant leurs fonctions dans les locaux de leur employeur public (code général de la fonction publique, CGFP, art. L.430-1). Le décret du 11 février 2016 précise que les agents exerçant leurs fonctions en télétravail bénéficient des mêmes droits et obligations que ceux exerçant sur leur lieu d’affectation. Enfin, un document rappelant les droits et obligations de l’agent en matière de temps de travail et d’hygiène et de sécurité doit notamment lui être remis avec l’autorisation d’exercer ses fonctions en télétravail.

10 – Qu’est-ce que le « forfait télétravail » ?

Depuis le 1er septembre 2021, les agents publics territoriaux ainsi que les apprentis ayant conclu un contrat d’apprentissage relevant avec une collectivité territoriale (ou un de ses établissements publics) peuvent bénéficier d’une indemnité « forfait télétravail » à condition qu’une délibération de l’organe délibérant l’ait prévue. Ce forfait est versé tous les trimestres. Son montant est fixé actuellement à 2,50 euros par journée de télétravail effectuée dans la limite de 220 euros par an. Il est versé sur la base du nombre de jours de télétravail demandé par l’agent et autorisé par ­l’autorité compétente. Le cas échéant, il fait l’objet d’une régularisation au regard des jours de télétravail réellement effectués au cours de l’année civile. Cette régularisation intervient à la fin du premier trimestre de l’année suivante.

En effet, le décret du 11 février 2016 prévoit que l’employeur doit prendre en charge les coûts découlant directement de l’exercice des fonctions en télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci. En revanche, l’employeur n’est pas tenu de prendre en charge le coût de la location d’un espace destiné au télétravail.

RÉFÉRENCES
24 août 2022
La Gazette des Communes